Biennale « Danse l’Afrique Danse! » et échanges avec Madagascar

Biennale « Danse l’Afrique Danse! » et échanges avec Madagascar

Du 29 octobre au 05 novembre 2010, des centaines de chorégraphes, venus de 17 pays d’Afrique, se réunissent pour participer à la 8ème édition de la Biennale « Danse l’Afrique Danse 2010! », Angelin Preljocaj participe à cet événement en qualité de président du jury.

« Lorsque l’on m’a proposé d’être Président du Jury « Danse l’Afrique Danse ! » à Bamako en octobre dernier, j’ai été extrêmement troublé. Lors de mes précédents visites en Afrique, j’avais plutôt découvert une « danse africaine contemporaine », faite de spectacles de danses traditionnelles remises au goût du jour et affublées de clichés qu’affectionnent particulièrement certains programmateurs en mal d’exotisme. Or ce qui s’est profilé sous mes yeux durant ce concours était clairement une “danse contemporaine africaine” et non plus une “danse africaine contemporaine”. Le distinguo peut paraît subtil, il n’en est pas moins le reflet d’une réalité. Subitement, bien qu’ancrée dans leur culture, cette danse s’inventait une modernité emblématique de ces pays d’Afrique. Fortement imprégnés de leur identité mais regardant sans concession notre monde à travers leur recherche, ces chorégraphes nous requestionnaient sur les fondements même de la création.
C’est pourquoi, suite à ce voyage, il m’a paru important de ponctuer la saison 2011-2012 au Pavillon Noir avec les pièces de ces chorégraphes africains que j’ai aimés et rencontrés : la soirée des lauréats avec le malgache Junior Zafialison, le congolais Florent Mahoukou et le mozambicain Horacio Macuacua, mais également le malien Aly Karembé. Par ailleurs, j’ai constaté avec regret que peu de femmes investissaient le champ de la danse contemporaine, ou plutôt qu’elles avaient été progressivement évincées de la scène chorégraphique qui représente dans ces pays un enjeu économique nouveau. De là découle l’invitation de la sud-africaine Nelisiwe Xaba, démonstration magistrale de la force que peut déployer la sensibilité féminine dans la création chorégraphique de cette région du monde. »

Angelin Preljocaj, directeur artistique du Ballet Preljocaj

Dans le cadre d’une sensibilisation à la danse contemporaine auprès des populations locales, des représentations du Groupe Urbain d’Intervention Dansée (G.U.I.D.) ont sillonnés différents espaces publics et établissements scolaires à Bamako.

Suite à cette expérience à Bamako, Angelin Preljocaj a invité en résidence de création le chorégraphe malgache Junior Zafialison, lauréat de la mention spéciale du jury de la Biennale africaine. Bénéficiant du programme « Visas pour la création » de l’Institut français, Junior travaille durant 3 mois à l’élaboration de sa nouvelle pièce, La politique de l’autre ruche qu’il présente au Pavillon noir le 24 juin 2011. Il participe également au projet 2011 du G.U.I.D.

« De par ce projet, j’ose espérer atteindre le public, tout peuple confondu, afin que ceux qui ne sont pas conscients puissent réfléchir et que ceux qui le réalisent puissent agir quant à leur environnement politique. À travers ma danse, je veux donc dénoncer tout abus de pouvoir exercé par les têtes de chaque pays de la planète. Cela peut concerner Madagascar, la Birmanie ou d’autres pays qui souffrent du fléau de la dictature. Cette fois, bien moins timide que Ail ? Aïe ! Aïe ! cette création restera poétique mais un peu plus cru dans l’humour utilisé. »

Junior Zafialison

Junior Zafialison est né en 1984 à Antalaha, à Madagascar. Il étudie l’anglais et choisit de se consacrer à la danse en 2004. Il débute par le classique, le hip hop et la danse africaine puis se tourne vers la danse contemporaine. Il se forme avec différents chorégraphes dont Bernardo Montet, qui le choisira pour interpréter Marguerites de l’oubli en 2009, Pascal Montrouge, Taoufiq Izzediou, Kettly Noel… Il enseigne désormais la danse contemporaine à Madagascar et développe ses propres créations. En 2010, il présente son solo Ail ? Aïe ! Aïe ! avec lequel il remporte la mention spéciale du jury de la Biennale africaine « Danse l’Afrique danse ! » qui s’est tenue à Bamako. Il s’associe au danseur et chorégraphe Aly Karembé avec Danse esprit, danse en corps et encore, un duo également très remarqué lors de la Biennale. Cette année, il bénéficie du programme « Visas pour la création » de l’Institut français afin de travailler à l’élaboration de La politique de l’autre ruche, durant trois mois de résidence au Pavillon Noir.