Six danseurs-hélices dessinent leurs trajectoires sur le célèbre Helikopter-quartet de Stockhausen.
Angelin Preljocaj signe une chorégraphie radicale et vrombissante avant de partager sa dernière création surprise.
Glissandi de cordes et sons de turbines envahissent la salle. Nous voici plongés dans un vacarme musical venu du ciel, comme le fut Angelin Preljocaj lorsqu’il découvre le quatuor de Stockhausen. Le compositeur allemand écrit sa partition pour quatre musiciens et quatre hélicoptères en 1995. Sous cette musique qui les mouline, les assomme ou les souffle, les danseurs évoluent. Projetées sur le sol, les vidéos de Holger Förterer les exposent aux rotations de lumière. Dans cet espace entre le ciel et la terre, l’humanité semble résister, comme écrasée mais toujours déployée. La magie du dernier mouvement ouvre alors un silence providentiel à la nouvelle création du chorégraphe. Un peu sonnés par Helikopter et fascinés par la beauté de son épure, vous serez prêts pour découvrir ce dernier opus d’Angelin Preljocaj.
« Lors de la première audition d’Helikopter-quartet’, de Karlheinz Stockhausen, l’idée de créer une pièce chorégraphique sur cette musique ne m’a pas du tout effleuré l’esprit tant cette œuvre semblait laminer, à chaque coup d’hélice, les fondements même d’un rapport entre musique et danse. C’est cependant pour cette raison même qu’à la seconde écoute, le désir jubilatoire de se confronter aux entrelacs des turbines d’hélicoptères et des glissendi du Quatuor Arditti s’est imposé d’une façon irrépressible. Exposer six danseurs aux rythmes effrénés et technorganiques de cette pièce, tel sera l’enjeu de cette création. »
HELIKOPTERQUARTET’
HELIKOPTERQUARTET’
QUATRE HÉLICOPTÈRES AVEC PILOTES ET PRENEURS DE SON l QUATUOR À CORDES
« Début 1991, le professeur Hans Landesmann, du Festival de Salzbourg, me passa commande d’une œuvre pour quatuor à cordes, qui devrait être créée par le Quatuor Arditti en 1994. C’est alors que je fis un rêve : je vis et entendis les musiciens du quatuor jouant en plein vol dans quatre hélicoptères. Je vis simultanément des gens au sol, assis dans une salle équipée de matériel audiovisuel, et d’autres à l’extérieur, debout sur une grande place. Devant eux, on avait érigé quatre tours constituées de téléviseurs et de haut-parleurs : à gauche, à mi-gauche, à droite, à mi-droite. Dans chacune des quatre directions, on pouvait entendre et voir en gros plan l’un des quatre musiciens. Les musiciens exécutaient la plupart du temps des tremolos qui s’harmonisaient si bien avec les timbres et les rythmes des pales de retors que les hélicoptères en devenaient comme des instruments de musique… »
Karlheinz Stockhausen
Avec l’aide de l’armée autrichienne pour l’obtention des hélicoptères, de la radio et la télévision pour le raccordement aux canaux de transmission audio-vidéo et grâce au soutien de nombreux sponsors et de l’administration pour l’ensemble des autorisations, le rêve devint réalité le 26 juin 1995 à Amsterdam : trois vols eurent lieu en création mondiale pour 3 représentations. Dès la première de l’œuvre, son retentissement fut considérable et international, la presse s’étant emparée avec enthousiasme de ce happening géant entre ciel et terre, de cet opéra vertical dans lequel les cordes vibrent en un constant trémolo, épousant les ru-gissements des pales d’hélicoptères qui deviennent ainsi des instruments à part entière. À l’écoute de ce rêve de Stockhausen, accessible sur CD, chacun sentira la terre et le ciel trembler pour entrer dans une quatrième dimension… Ce disque a obtenu le Grand prix du disque 2000 de l’Académie Charles Gros (53 Palmarès), le 28 novembre 2000.